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vendredi 17 février 2017

Mort de William Décoiré : la légitime défense de nouveau contestée


FAITS DIVERS. Me Lucien Felli, l’avocat de la maman de William Decoiré, ce jeune homme de Saint-Louis tué fin octobre par un gendarme, a déposé une plainte pour meurtre auprès d’un juge d’instruction, ouvrant un nouveau volet judiciaire à cette affaire.

L’avocat, qui avait défendu le clan Daweri dans l’affaire de la case de Petit-Couli l’an dernier, conteste la légitime défense au contraire des conclusions du parquet à la suite de l’enquête préliminaire classée sans suite par le parquet.

L’avocat, qui avait défendu le clan Daweri dans l’affaire de la case de Petit-Couli l’an dernier, conteste la légitime défense au contraire des conclusions du parquet à la suite de l’enquête préliminaire classée sans suite par le parquet.

 Il veut que toute la lumière soit faite sur cette affaire. De passage sur le Caillou, Me Lucien Felli, avocat corse au barreau de Paris, a déposé une plainte avec constitution de partie civile contre X pour meurtre auprès du doyen des juges d’instruction, ouvrant de facto un nouveau chapitre judiciaire sur la mort de William Décoiré, ce jeune homme de 23 ans originaire de Saint-Louis, tué d’une balle tirée par un gendarme. Une vague de violence avait ensuite éclaté aux abords de la tribu, entre barricades sur la RP1, tirs et blessures sur les gendarmes et violentes agressions d’automobilistes. Depuis, les tensions ne sont toujours pas retombées, exaspérant la population qui emprunte quotidiennement ce qu’elle nomme désormais le « couloir de la mort ».

« faire feu dans les pneus »

À la suite de l’enquête préliminaire classée sans suite, le parquet de Nouméa avait conclu à la légitime défense du gendarme. Une version que contestent formellement Mes Lucien Felli et Jacques Loye, les avocats de la maman de William Décoiré.
« Nous allons démontrer que nous ne sommes pas dans le cadre de la légitime défense au sens du code pénal. Il y a des affaires similaires en Métropole qui avaient d’abord fait l’objet d’un classement sans suite, puis l’instruction a conclu qu’il n’y avait pas de légitime défense », explique Me Felli. Pour ce défenseur des militants nationalistes corses, « l’enquête a été trop rapidement clôturée » ce qui a automatiquement mené « à une montée de violence ».
Celui qui défend Line Décoiré va plus loin. « La mort de William est une bavure du gendarme », avance, d’un ton calme, Lucien Felli qui ne comprend pas pourquoi « le militaire a tiré à hauteur d’homme » alors qu’« il aurait pu faire feu dans les pneus ». Maintenant que la plainte est déposée, l’ouverture d’une information judiciaire est entre les mains du parquet avant de passer dans celles du juge d’instruction.

« Un combat pour la vérité »

« Nous allons demander une expertise balistique, un profil complet du tireur, une nouvelle reconstitution et des auditions plus précises des témoins de la scène », liste l’avocat, confiant dans la capacité du juge d’instruction « à percevoir le dossier à charge et à décharge » (lire ci-contre).
S’il réclame « la vérité en toute sérénité », Me Felli se montre également méfiant. « Je ne veux pas que ce dossier soit mis au placard », assure le conseil. Car, selon lui, « la justice doit faire passer un message de transparence, de pacification » afin de calmer les exactions qui font rage autour de Saint-Louis. « Cette affaire intervient dans un contexte politique complexe et turbulent. Il faut à tout prix éviter la manipulation », insiste ce professeur associé de droit public et de droit constitutionnel.
S’il défend Line Décoiré dans « son combat pour la vérité », c’est parce qu’elle a « un besoin éperdu de justice ». Cette maman ne demande aujourd’hui qu’une chose : « que justice soit faite pour mon fils ».


Dans la plainte, que nous avons pu consulter, les avocats de la mère de William Décoiré avancent plusieurs arguments pour contester la légitime défense. Des éléments dont la véracité devra être analysée par la justice, en cas de réouverture du dossier.
En premier lieu, ils évoquent la position du gendarme lorsque William Décoiré a tenté de prendre la fuite au volant de la camionnette. « Parfaitement à l’abri, il a décidé de sa propre initiative de sortir de sa position de protection pour se placer à l’avant droit du véhicule qui avait déjà entrepris ses manœuvres de fuite », estiment les avocats qui ajoutent que William Décoiré « n’a pas pu anticiper que le gendarme allait se précipiter devant son capot », concluant que le jeune homme ne « cherchait pas à renverser ou à blesser qui que ce soit puisqu’il fuyait ». Autre point clé, le tir mortel. De leur avis, « le gendarme a réalisé un tir visant bien le haut du corps et notamment la tête du conducteur », alors qu’« en tout état de cause pour immobiliser le véhicule - ce qui aurait dû être l’objectif premier - il aurait tout à fait pu tirer sur les roues du véhicule ». Mes Loye et Felli entendent enfin « confronter les gendarmes et les témoins présents dans la camionnette ».