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mercredi 17 février 2016

La politique environnementale de la maire de Nouméa

Depuis quinze jours, la nourriture pourrit sous l’amiante à Ducos

Publié le mercredi 17 février 2016 
Dans la nuit du mercredi 3 au jeudi 4 février, les enseignes Serdis, Foir’Fouille et Champion à Ducos étaient dévastées par les flammes. Depuis, les autorités luttent pour éviter la crise sanitaire. Le point sur les avancements d’un chantier unique en Nouvelle-Calédonie.

Ducos, hier. Impossible à présent de s’aventurer derrière la palissade sans être équipé d’un casque et surtout d’un masque. Sans cet équipement, l’odeur est tout simplement insupportable.

Ducos, hier. Impossible à présent de s’aventurer derrière la palissade sans être équipé d’un casque et surtout d’un masque. Sans cet équipement, l’odeur est tout simplement insupportable.
Photos Jean-Alexis Gallien-Lamarche
Impossible de pénétrer au sein même du chantier. Navré, l’agent de sécurité reste ferme, tout comme la consigne qu’il a reçue. Car les risques sont bien réels de l’autre côté de l’enclos, posé tout autour des décombres sitôt l’incendie maîtrisé.
« Même si les produits aspergés permettent de fixer l’amiante pendant au moins trente jours, cela reste un chantier où des structures peuvent s’effondrer. Et puis sans masque, vous ne tiendriez pas à cause de l’odeur. »
L’odeur pestilentielle écœure certains automobilistes jusque sur la Savexpress et, devant le chantier, provoque en quelques secondes la nausée.

Pomper l’eau qui s’écoule puis dégager les tôles
« On s’habitue, assure un ouvrier du chantier. Au début c’était impossible, mais petit à petit, on s’y fait. » Les masques respiratoires, comprenant un filtre intégré dont certains envoient même des réserves d’air frais, y sont pour beaucoup. Mais vu la tâche à accomplir, mieux vaut être équipé. Si le problème de pollution à l’amiante a été réglé - avant que le problème du stockage n’arrive sur la table -, il s’agit maintenant de se débarrasser des eaux stagnantes et de la nourriture, « cuite » durant l’incendie et désormais en putréfaction.
« Il a fallu remettre l’électricité, et maintenant, on est en train de réinstaller l’eau, explique un employé en pleine manœuvre. C’est pour cela que nous travaillons également à l’extérieur du périmètre. » Sur une autre entrée, les camions d’Hydroclean sont présents. Cette fois-ci, il s’agit de pomper l’eau qui s’évacue après les pluies. En outre, certaines conduites n’ont pas tenu sous la chaleur. « Nous sommes présents depuis lundi dernier, raconte un employé. Nous récupérons l’eau qui sort afin de ne pas polluer. Il y a de la nourriture, des détergents et bien d’autres substances qui s’écouleraient dans les bouches d’égout. Nous stockons les matières organiques qui s’accumulent. »
Avec les pluies diluviennes qui sont tombées lundi, la catastrophe a été évitée. Mais il y a forcément eu un laps de temps, plus d’une semaine, où aucun dispositif de récupération n’a été mis en place. Sans ce pompage, toutes ces eaux se déversent dans… la mangrove. Justement là où une mortalité anormale de poissons a été constatée, à l’anse Uaré.

La nourriture et l’odeur, dernière étape
« Il faudra ensuite retirer toutes les structures qui menacent de s’effondrer, indique un autre manœuvre. Toutes les structures apparentes ne sont pas de simples tôles. C’est ça le fameux fibrociment bourré d’amiante. Une fois sécurisé, on procédera au pompage puis au déblaiement des 150 tonnes de poussière, de nourriture… »
En attendant, les réunions quotidiennes se poursuivent au sein de la Direction de la sécurité civile, en charge de coordonner l’opération. Avant de présenter un plan définitif d’action, le service gouvernemental s’est d’abord attelé à éviter la prolifération des rats et des moustiques, face à une situation unique en Nouvelle-Calédonie.
« C’est vrai que je n’en ai pas remarqué, admet une employée d’un magasin du complexe le Plexus, situé à cinquante mètres du fameux périmètre. Nous sommes plutôt chanceux, comparé à d’autres à côté. Le seul véritable problème, c’est cette odeur, qui de temps à autre, vient jusque dans la galerie. »
Jean-Frédéric Gallo

150 tonnes.C’est la quantité de nourriture actuellement dans les eaux stagnantes sous les décombres. L’incendie a démarré dans les chambres froides et aucun produit périssable n’a encore pu être retiré.
Repères
Un cas quasi-identique en Métropole
À Creil, en région parisienne, le déblaiement d’un supermarché est annoncé pour fin mars prochain… Soit presque deux ans après l’incendie qui a ravagé son enceinte. Mais pendant ces vingt-deux mois de statu quo, les riverains ont vécu l’horreur. Ils ont constaté l’invasion de rongeurs, de mouches et de vermines à cause de la nourriture en putréfaction dans les ruines calcinées du supermarché. Évidemment, les odeurs pestilentielles qui se sont dégagées du site incendié ont également rendu la vie impossible aux habitants.
EPLP veut une réglementation plus ferme« Il ne faut pas compter sur un retour d’analyse pour comprendre ce qu’il s’est passé, assure Martine Cornaille, présidente d’Ensemble pour la planète. Il y a eu plusieurs milliers de mètres cubes déversés dans la mangrove emplie de matière organique. » Pour l’association, il faut que cette catastrophe serve de leçon, notamment au niveau de l’amiante. « Il faut faire imposer des moyens de lutte passive contre les incendies ; des détecteurs de fumée dans tous les commerces et les docks, ainsi que des arrosages automatiques. La majorité des bâtiments sont composés d’amiante en Nouvelle-Calédonie. Imaginez si cela arrivait en plein centre-ville. »