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mardi 28 mars 2017

Élie Domota: "En Guyane et en Guadeloupe, les racines du mal sont les mêmes"

Et en Kanaky aussi !

Dans un entretien au HuffPost, le leader indépendantiste guadeloupéen exprime sa solidarité avec les grévistes guyanais.

Le leader indépendantiste guadeloupéen Elie Domata apporte son soutien aux grévistes de Guyane.
GUYANE - C'est un soutien plein et entier qu'il apporte aux grévistes guyanais. Fer de lance de la mobilisation syndicale lors de la grève générale en Guadeloupe en 2009, Elie Domota fait très largement le lien entre les deux combats.
Comme il le dit dans cet entretien, le syndicaliste (il est secrétaire de l'Union générale des travailleurs de Guadeloupe, UGTG) affirme que "les racines du mal sont les mêmes". Partisan d'une libre détermination des peuples, cette figure indépendantiste estime que les Guyanais ont entamé un combat qui doit mener à terme vers "la décolonisation".
En quoi vous reconnaissez-vous dans le mouvement social qui touche la Guyane?
Les racines du mal sont les mêmes. Le retard de développement, l'illettrisme, l'analphabétisation, le chômage de masse trouvent leur origine dans la même situation. Cette situation, il faut la nommer : c'est la domination coloniale. On peut nous dire que la Guadeloupe, la Martinique ou la Guyane sont des régions françaises, des départements d'outre-mer, ce sont en réalité toujours des colonies et la vocation de la colonie c'est de servir les intérêts de la métropole.
Guadeloupéens, Martiniquais, Réunionnais, Guyanais ou Kanaks, nous n'avons jamais été considérés comme des citoyens français. L'histoire est là pour le rappeler. Quand, en 1789, la France promulgue la Déclaration des droits de l'homme, les Guadeloupéens sont esclaves. Quand, en 1848, la France abolit l'esclavage en Guadeloupe, ce sont les propriétaires d'esclave que la République indemnise.
En 2009, à l'issue d'une grève de près de 50 jours, vous aviez tout de même signé un accord...
Toutes les politiques publiques mises en œuvre depuis toujours en Guadeloupe n'ont qu'un seul objectif: nous maintenir dans la domination et la soumission pour nourrir et entretenir les intérêts de la métropole. Ce qui a été fait en 2009 avait pour seule ambition de calmer le jeu mais le cœur du problème n'a pas été traité.
L'accord signé à l'époque était pourtant très large?
En 2009, il y a des questions fondamentales qui ont été posées sur le développement économique et social sur l'insertion, sur le transport, sur la santé, sur le développement agricole. Mais aucune de ces questions n'a jamais connu de réponses concrètes. Les accords n'ont jamais été respectés aussi bien par le gouvernement Sarkozy que par le gouvernement Hollande. Les textes adoptés pour lutter soi-disant contre sur la vie chère ont justement fait la part belle aux multinationales et aux importateurs distributeurs, pas aux Guadeloupéens.
Et vous redoutez la même chose en Guyane?
C'est certain, nous aurons les mêmes effets. Le gouvernement français va annoncer un certain nombre de millions pour faire ceci ou cela mais le cœur du problème repose sur la décolonisation. Pour que nos pays puissent sortir de ce marasme et de ce pourrissement entretenus depuis des siècles, il faut que, un jour, nous puissions décider ce qui est bon pour nous.
Les luttes éclairent les luttes. Les Guyanais ont entamé un combat qui doit mener vers la décolonisation.
Vous appelez donc à voter à la présidentielle pour un candidat comme Philippe Poutou qui est favorable cette auto-détermination?
Ce sont des élections qui concernent la France. Notre mouvement aura une position sur ces élections françaises mais nous n'appellerons pas à voter pour qui que ce soit.
Quel message souhaitez-vous adresser aux grévistes?
Nous n'avons rien à leur conseiller. Les Guyanais sont suffisamment grands et forts pour combattre et poursuivre leur lutte comme ils doivent la mener. Mais je leur dis qu'ils ont raison de lutter. Ils ont raison de contester l'ordre établi, de demander que leurs enfants aient la chance d'accéder à l'excellence, à un travail. Ils ont raison de demander à être maître de leur pays, de prendre, en tant que Guyanais, les manettes de leur pays.
Les luttes éclairent les luttes qui éclairent les luttes. Quelle que soit l'issue de ce combat là, les Guyanais ont entamé un combat qui doit mener, selon nous, un jour, vers la décolonisation qui est la seule alternative possible.
Irez-vous en Guyane les soutenir?
Nous avons été invités mais les Guyanais sont suffisamment responsables et forts pour mener à bien leur mouvement. Nous les soutenons, nous sommes solidaires mais je reste en Guadeloupe.

 Alexandre Boudet Journaliste politique au HuffPost