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mardi 26 janvier 2016

NDDL : en cas d’expulsion, José Bové prédit « un trouble grave à l’ordre public »

NDDL : en cas d’expulsion, José Bové prédit « un trouble grave à l’ordre public »
© AFP
Alors que les expulsions des habitants de Notre-Dames-des-Landes sont confirmées par le juge, le député européen écologiste José Bosé « interpelle le Président et la ministre de l’Environnement pour qu’ils ne mettent pas en œuvre cette décision ». En cas d’expulsion, il prédit « un trouble beaucoup plus grave à l’ordre public ». « Dans les prochaines heures, les prochains jours, je suis certain que la protection de ces lieux va se faire. Des milliers de personnes vont venir sur le terrain pour protéger les fermes et les habitations » affirme José Bosé, qui prévient : « Personne ne laissera expulser les paysans et moi le premier ». Entretien.

Le tribunal de grande instance (TGI) de Nantes a décidé de confirmer l’expulsion des habitants du site du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, sans astreinte financière et avec un délai de deux mois pour huit des onze familles. Quelle a été votre première réaction en apprenant la nouvelle ?
C’est l’absurdité de la situation. Aujourd’hui, le tribunal de grande instance continue dans la logique de l’expropriation demandée par Vinci. En même temps, beaucoup de points ne sont pas du tout clairs par rapport aux espèces protégées, au fait qu’au niveau européen les règles ne sont pas respectées sur l’étude d’impact. Bref, on a deux droits qui fonctionnent en parallèle : le tribunal administratif avec tous les recours et de l’autre le TGI qui continue la procédure demandée par Vinci pour commencer les travaux. Ils demandent l’expulsion, le tribunal leur donne mais ils savent qu’ils ne peuvent pas commencer les travaux.
A l’heure qu’il est aujourd’hui, la balle est très clairement dans les mains du gouvernement, de la ministre de l’Environnement et du président de la République. Il y a eu un accord entre PS et EELV au moment des régionales pour remettre à plat l’ensemble du dossier, revoir de fond en comble les questions financières, de faisabilité. Il y a aussi la question de l’aéroport de Nantes-Atlantique tel qu’il existe aujourd’hui. Tout le monde s’accorde pour dire que les discussions doivent être reprises et le tribunal va à l’encontre de ces principes.
La parole politique doit prendre le dessus. J’interpelle le Président et la ministre de l’Environnement pour qu’ils ne mettent pas en œuvre cette décision car elle est pourrait créer un trouble beaucoup plus grave à l’ordre public, et qu’on ouvre le débat. On ne peut pas régler la question par l’expulsion des habitants et des paysans historiques.
Les bâtiments agricoles pourraient être détruits dès demain. Vous parlez de « trouble à l’ordre public ». Quelles seraient les conséquences si l’expulsion commence dans les prochains jours ?
Je parle de trouble à l’ordre public car je suis sûr que cette mise en œuvre sera impossible. Dans les prochaines heures, les prochains jours, je suis certain que la protection de ces lieux va se faire. Des milliers de personnes vont venir sur le terrain pour protéger les fermes et les habitations. C’est pour cela que le trouble à l’ordre public sera plus important si la décision est mise en œuvre, que si elle ne l’est pas. Pour mettre en œuvre la décision, il faut que le préfet saisisse les forces de l’ordre. L’Etat peut dire que le risque étant plus important, il ne met pas mettre en œuvre les moyens pour la rendre faisable.
Interrogé sur le projet d’aéroport en janvier 2015 sur France Inter, François Hollande avait affirmé qu’« il y a des recours, tant que les recours ne sont pas épuisés, le projet ne peut pas être lancé, quand les recours seront épuisés, le projet sera lancé ». Reste-t-il des recours pour les opposants ?
Oui, il y en a de nombreux. En plus, il y a des éléments nouveaux comme la découverte d’un certain nombre d’espèces sur la zone et le contentieux avec l’Union européenne, qui a saisi la France. Or la France ne lui a pas répondu de manière satisfaisante. Les études d’impact, qui pouvaient être globales, se sont faites par morceaux. C’est contraire au droit européen. Le dossier est entaché d’erreurs. Et tous les recours ne sont pas finis. Dès 2012, le Président s’était engagé à geler le projet tant qu’on n’avait pas épuisé l’ensemble des recours. Le gouvernement a les éléments pour sortir de cette situation.
C’est un moratoire que vous demandez ?
Il faut clairement l’annonce par les pouvoirs public que cette mesure d’expulsion ne sera pas mise en œuvre, qu’on entame le processus de discussion avec en priorité l’étude sur l’aéroport actuel de Nantes, qu’on ne peut pas continuer et qu’il faut rouvrir l’ensemble du débat. Sinon le risque est grand et on ne laissera pas faire. Personne ne laissera expulser les paysans et moi le premier. Il n’y aura pas d’expulsions et tous les moyens seront mis en œuvre. Mais j’espère qu’on ne sera pas obligé d’en arriver là.
Par ailleurs, tout le monde s’est félicité de l’accord de Paris pour la COP21. Tout le monde a reconnu la nécessité d’une société qui gaspille moins, qu’il fallait changer de mode de développement. Et un mois après on fait fi de cette avancée de la COP21 en mettant en œuvre un projet qui date de la fin des années 60 et n’a plus aucun sens. Le but était de faire atterrir le Concorde, qui est arrêté…
On sait que Manuel Valls souhaite faire le projet. Pensez-vous que le premier ministre et François Hollande sont sur la même ligne ?
Mon sentiment, c’est que François Hollande a compris quels étaient les enjeux. Il y a la nécessité d’agir pour trouver une solution. C’est évident qu’il y a aussi la perspective de 2017. Je ne voix pas comment un projet, une alliance pourraient se construire avec EELV, mais pas que, aussi beaucoup de gens à gauche, si ça se faisait sur les décombres de Notre-Dame-des-Landes. Ce serait un signal terrible. Je pense que le premier ministre n’est absolument pas dans cette compréhension. Il est presque dans une logique jusqu’au-boutiste, il n’a jamais caché qu’il y était favorable. Il faut un arbitrage au plus haut niveau. Seul le Président peut sortir ce dossier de cette situation.