Elle est propriétaire d'un magasin qui vend des bateaux pneumatiques et des gilets de sauvetage. "On est fautifs", avoue-t-elle, "mais si ce n'est pas nous, ç'en est d'autres."
L'enquête
de France 2 démarre à quelques kilomètres de Bodrum, ville balnéaire de
Turquie d'où partent depuis plusieurs mois les migrants vers la Grèce,
puis vers les pays de l'Europe de l'Ouest. Sur la plage et dans les
fourrés, les reporters de France 2 découvrent des vêtements épars, mais
aussi des restes de bateaux pneumatiques et des emballages éventrés
vraisemblablement destinés aux migrants. Qui vend ce matériel, utilisé
notamment par les réfugiés qui prennent la mer ?
L'un
de ces magasins appartient à la consule honoraire de France, installée
dans la ville depuis de nombreuses années. Une plaque "Consul honoraire
de France" est d'ailleurs apposée à l'entrée du magasin. Rappelons qu'il
s'agit là d'une occupation bénévole, compatible avec une activité
commerciale, comme l'indique le site du Quai d'Orsay.
Interrogée
en caméra cachée, la patronne des lieux explique qu'elle n'est pas
regardante sur l'identité de ses clients. A propos des migrants, elle
assure : "On ne peut pas les empêcher de partir (...), et si nous,
on ne vend pas, celui qui est à côté vendra, celui qui est derrière
vendra…" se justifie-t-elle. Et d'ajouter : " Ça ne change absolument rien." A la question : "Vous êtes consciente que la consule honoraire de France alimente le trafic ?", elle répond "Oui", mais affirme qu'à Bodrum, d'autres sont dans ce cas : "la mairie", "le capitaine du port", "la sous-préfecture". "On est fautifs quand même, finit-elle par lâcher, mais si ce n'est pas nous, ç'en est d'autres."
Après la diffusion de ce reportage, le ministre des Affaires étrangères Laurent Fabius a aussitôt suspendu de ses fonctions la consule honoraire, indique le Quai d'Orsay.