Journaliste : Nous
avons le plaisir de recevoir Monsieur Gérard Régnier, le secrétaire
général de l’UC. Bonjour et merci d’avoir accepté cette invitation.
Gérard Régnier : Bonjour.
Journaliste : Hier, une nouvelle élection de la présidence et de la vice-présidence du gouvernement. Une réaction ?
Gérard Régnier : Il
est vrai que nous avons un gouvernement qui est en place depuis hier,
gouvernement qui a été mis en place par des voix de Calédonie ensemble
et certaines voix indépendantistes, pas toutes, au niveau du
gouvernement, pour mettre Philippe Germain président et Jean-Louis d’Anglebermes, vice-président.
Les auditeurs, et plus particulièrement les militants de l’UC, doivent
se poser énormément de questions à l’heure qu’il est. Le secrétaire
général que je suis ne se sent pas lié par le communiqué qui est sorti
hier. Pourquoi ?
Journaliste : Il faut rappeler qu’il y avait eu un communiqué, en milieu de journée, signé par les responsables des différentes composantes du FLNKS, les responsables de l’UC, son président, le porte-parole du Palika, le président du RDO, et le président de l’UPM.
Gérard Régnier : Je ne me sens pas lié parce que notre président a décidé de signer ce communiqué, il a pris sa responsabilité, je pense qu’il aura à s’expliquer, que ça soit auprès de la population ou auprès des militants eux-mêmes,
directement. Je suis resté dans la démarche que nous avions engagée.
Nous avions eu une réunion de la commission exécutive pour analyser la
situation et à cette commission exécutive, il était
prévu de la possibilité de faire un choix au niveau du gouvernement.
Nous avions dit que les choses étaient pas prêtes, et elles n’étaient
pas encore mures pour faire ce choix et nous sommes partis sur une
démarche et différentes hypothèses. La première démarche, c’était un
contact direct avec le Palika, que nous avons eu lundi après-midi, où le Palika,
en gros, nous avait dit, nous, on fait une proposition de voter
Calédonie ensemble, mais c’est vous, parce que vous avez la capacité de
faire la majorité, à faire ce choix. Donc, faites le choix et venez nous
revoir. Nous avions demandé
d’aller plus loin dans la démarche, d’être ensemble, parce que la
vision que nous avons, ce n’est pas de faire un choix d’un homme, c’est
de faire le choix d’une politique, de faire avancer les dossiers qui
sont nécessaires, de faire avancer les réformes qui sont nécessaires. On
souhaitait être ensemble pour pouvoir travailler sur ces dossiers, sur cette démarche,
et ensuite pouvoir remettre en place un gouvernement qui se penche tout
de suite sur ces dossiers. L’autre chose qui avait été acté, c’est que
notre groupe institutionnel, l’UC, FLNKS et Nationaliste, était
missionné pour continuer à rencontrer les autres groupes, et plus
particulièrement les groupes non-indépendantistes,
pour aborder ces dossiers et aborder cette démarche. Il nous semblait
important et intéressant qu’on sorte de cette crise parce que c’était
une crise, et que l’on puisse trouver tout le monde au travail, tout le
monde autour des dossiers, qu’on puisse faire avancer les dossiers, non
pas dans une démarche de résistance, etc. C’était un peu cette démarche
qui a été engagée et en bout de compte, une nouvelle commission
exécutive pour revoir. Tout ça a été mis à mal par une décision du
président. Bon, il s’en expliquera, je pense, chez nous, la parole est
un élément essentiel, et donc, on aura une réunion de bureau
certainement la semaine prochaine. Il aura à s’en expliquer et nous
aurons à échanger
sur le sujet. Mais pour l’instant, une chose est sûre, c’est que
personnellement, secrétaire général de l’UC, ne se sent pas lié, il a
remarqué que deux ministres sur trois n’étaient pas non plus liés par ce
communiqué au gouvernement.
Journaliste : Certains dossiers sont tout de même avancés dans ce communiqué. Estce que vous allez aussi revoir ces dossiers proposés par ce communiqué ?
Gérard Régnier : C’est
un peu ambigu, parce qu’on dit, c’est sans contrepartie, et en même
temps, on annonce quatre dossiers. Alors, chez nous, il n’y a que le
président qui est au courant de l’avancée de ces dossiers, donc il
faudra qu’il nous informe aussi sur l’avancée de ces dossiers. Est-ce que le premier dossier qui va être présenté au gouvernement sera le calendrier qui permet le transfert des articles 27 ? Moi, je n’y crois pas trop, mais on verra, pourquoi pas. Tout ça peut paraître un peu bizarre, estce que des négociations se sont passées au coin de table ?
En tout cas, elles ne se sont pas passées au bureau politique. L’UC a
toujours souhaité que ça soit fait au sein du bureau politique. L’UC
avait même proposé que les décisions soient prises en congrès du FLNKS,
c'est-à-dire où on avait l’assentiment de l’ensemble des groupes, mais l’assentiment aussi des militants du congrès FLNKS. On sait que le congrès n’a pas pu se tenir et nos camarades du Palika et de l’UPM n’étaient pas très chauds
pour
que ces choses soient évoquées lors du congrès. Quand on veut porter
une politique ou quand on veut porter un pays, il faut que les choses
puissent être transparentes, puissent être visibles, lisibles, par nos
populations, parce que nos populations ont besoin de fondamentaux, ont
besoin d’une assise. Et c’est pas en prenant des décisions autour d’une
table, autour d’une
tasse de café, qu’on peut faire avancer les choses. Les structures qui
sont les nôtres sont faites justement pour permettre cette lisibilité.
Passer à côté du bureau politique pour aborder ce sujet, passer à côté
d’une commission exécutive, c’est pas très bon, c’est pas très sain,
c’est pas très sain aussi pour la démocratie. Je sais que le groupe UC,
FLNKS et
Nationaliste
est en réunion, on sait que le président de l’UC fait partie de ce
groupe, donc il aura besoin aussi de venir expliquer sa démarche,
expliquer le bien fondé de cette démarche au sein de ce groupe parce que les
dossiers qui vont se présenter au Congrès devront être débattus,
devront être discutés, devront obtenir une majorité à un moment ou à un
autre. J’ai entendu madame Déwé Gorodey
parler de l’agenda fiscal, on sait que nous, le groupe UC, FLNKS,
Nationaliste n’a pas participé à cet agenda fiscal. Nous n’avons pas
voté les premières mesures, donc il va falloir venir convaincre le
groupe si on reste sur cet agenda partagé ou si on va plus loin et on
prend en compte le travail de deux ans, des commissions qui se sont
tenues pour une modification du système fiscal au niveau du pays. Est-ce qu’on va prendre en compte ces travaux qui ont été réalisés au sein d’une commission pendant deux ans au Congrès, ou on va vouloir nous imposer les choses ?
Si on veut faire avancer, il faudra que les textes passent, passent au
Congrès, passent avec une majorité. Le débat reste encore complètement
ouvert sur l’analyse des dossiers.
Journaliste : Au sein de l’UC, est-ce que vous pensez qu’un comité directeur extraordinaire se fasse ?
Gérard Régnier : Il faut d’abord qu’on ait une réunion de bureau. Gilbert Tuyénon fait partie de ce bureau, le secrétaire général, le président, Jean-Louis d’Anglebermes
fait partie de ce bureau. Il faut déjà qu’on débatte entre nous, qu’on
se parle, qu’on regarde les choses, et ensuite, on verra s’il y a besoin
d’un comité directeur. En tout, il y a besoin d’une information sur
cette situation, sur cette décision. Pour nous, c’est pas trop un souci,
on avait prévu une tournée…,
c’est notre congrès qui nous avait demandé que le bureau puisse être
présent dans l’ensemble des comités locaux cette année. On avait prévu
une tournée dans nos comités locaux, donc ça peut être aussi l’occasion
d’une rencontre directe avec le bureau et d’une explication. Le
problème, c’est
que cette explication est due par le président. C’est le président qui
doit expliquer, ensuite on doit en parler au niveau du bureau.
Journaliste : Il y a aussi un besoin de s’expliquer à l’intérieur de ce groupe au Congrès ?
Gérard Régnier : Oh
non, je crois que les explications, c’est bon. Le secrétaire général
qui siège maintenant au sein du BP ne souhaite même pas qu’il y ait des
explications au sein de ce bureau politique, vu qu’on
voit bien que des gens se mettent en capacité de nuisance au sein de ce
BP et vont par ailleurs discuter, négocier en dehors du BP. On
comprend, je crois que l’UC s’est battue pour que le FLNKS reste ce qu’il est encore aujourd’hui. Je me souviens d’une intervention du porte-parole du FLNKS à l’époque, Victor Tutugoro pour ne pas le nommer, qui avait dit, le FLNKS, c’est fini, il faut passer à autre chose. Le Palika,
qui est porteur, c’est pas sa tasse de thé, le FLNKS. Sa tasse de thé,
c’est l’UNI, c’est Ouverture Citoyenne, etc. On connaît les positions
des uns et des autres, c’est vrai que l’UC a toujours souhaité maintenir
le FLNKS. Même aujourd’hui, on souhaite aller plus loin que le FLNKS,
c'est-à-dire à rassembler toute la mouvance indépendantiste. Je trouve que là, on manque peutêtre
un petit peu et certainement d’une démarche de cohésion, et surtout
d’une transparence totale pour pouvoir faire adhérer l’ensemble des
indépendantistes à une même démarche. C’est dommage. À trois ans du
référendum de 2018, je crois qu’il ne faut pas se mettre les pieds dans
le tapis. Bon, j’espère qu’on ait simplement trébuché, qu’on n’a pas mis
un genou à terre. On a mis un gouvernement qui est là pour aller
jusqu’au moins mai 2016, donc il va falloir faire avec ce gouvernement.
Demain, devraient se partager les secteurs, donc on va regarder encore
les secteurs. Je sais qu’à la dernière commission exécutive, par
exemple, le président s’était engagé à ce que les mines reviennent à
Gilbert Tuyénon, donc, on va le voir demain si réellement les paroles qui sont échangées, qui sont données, sont maintenues ou pas.
Journaliste : Il y a quand même une vice-présidence indépendantiste puisqu’il n’y avait plus de vice-président de ce gouvernement depuis l’année dernière !
Gérard Régnier : Je suis assez étonné puisque j’ai lu dans le journal d’aujourd’hui, la déclaration de madame Déwé Gorodey, qui dit, ce n’est que justice que ça soit la présidence Calédonie ensemble, parce que c’est le premier groupe et que la viceprésidence
à l’UC, parce que c’est le deuxième groupe. Ça aurait pu être ça aussi
il y a un an, puisque l’UC était toujours le groupe le plus important,
et donc, la candidature de Gilbert Tuyénon aurait pu être votée par le groupe UNI à ce momentlà, ce n’était que justice.
Journaliste : Le bilan que vous portez sur le BP lors des trois mois d’animation ?
Gérard Régnier : Je serai tenté de dire, bilan négatif parce qu’on s’est laissés manger par cette situation au gouvernement. On s’est laissés absorber par les stratégies mises en place par les non-indépendantistes.
C’est là où je parle de bilan quelque peu négatif. On a tenté, l’UC a
tenté, dans un premier temps, puisque beaucoup de choses se disent sur
les mines, d’éclairer ce qui est convergent, ce qui est divergent, et
essayer de se donner des outils pour justement permettre d’aplanir les
difficultés et de trouver des solutions. Mais là encore, je regrette le
constat. On avait missionné monsieur Victor Tutugoro pour nous tenir au courant des problèmes qu’il y avait sur KNS et donc, monsieur Tutugoro
ne s’est pas donné les moyens pour informer le bureau politique des
problématiques que l’on connaît aujourd’hui sur KNS. Forcément, quand on
est dans la désinformation ou quand on est dans la non information, on
subit les choses. Le BP doit faire quoi ?
Des communiqués constatant, mais on n’est plus acteurs. L’UC a essayé,
pendant ces trois mois, de donner véritablement toute la place qui
revient au FLNKS, et plus particulièrement par rapport à ce temps qu’il
nous reste au vu de la sortie. Peut-être, j’ai eu à le dire par ailleurs, c'est-à-dire que peut-être,
l’UC veut aller trop vite et que d’autres ne sont pas à la même
vitesse. Mais 2018 sera là de toute façon et 2018, il faudra dire si oui
ou non, on veut de cette pleine souveraineté. Et là-dessus,
quand on interroge les uns et les autres, tout le monde dit oui. Ok,
mais une fois qu’on a dit oui, comment on s’y prépare ? Nous, on souhaitait y mettre un congrès, ce congrès n’a pas pu se tenir pour diverses raisons, le Palika
a mission de faire en sorte que ce congrès se tienne. Ils ont dit
qu’ils feront mieux dans l’animation, dans la préparation, donc voilà,
on va attendre que le Palika nous propose un ordre du jour, une méthode, une démarche, mais nous,
nous restons volontaires pour que ce congrès du FLNKS puisse se tenir,
parce qu’il y a encore énormément de points à éclairer, et surtout à
faire pour éclairer les populations pour arriver à ce choix de la pleine
souveraineté, un choix porté par l’ensemble des populations de ce pays
pour la pleine souveraineté.
Journaliste : Est-ce
que le communiqué, hier, des responsables des différents partis
indépendantistes composant le FLNKS est l’illustration de ce qui ne va
pas au sein du FLNKS ou du bureau politique ?
Gérard Régnier : Essentiellement du BP. Je ne sais pas, peut-être
que les secrétaires généraux qui sont désignés par un comité directeur
pour siéger au nom de l’UC au BP ne sont pas à mêmes d’être les bons
porte-parole de l’UC. On voit bien que pour les autres camarades qui sont au sein du BP, de l’UPM, du RDO et du Palika,
on a l’impression qu’on n’est pas les bons interlocuteurs. À partir de
là, il faut aller discuter, négocier, discuter autour d’un repas, d’une
tasse de café, pour prendre des décisions sans pouvoir les prendre en bureau politique. Là se pose un problème aussi structurel au sein du BP.
Journaliste : On
n’oublie pas que le BP a soutenu les démarches militantes, notamment
sur les commissions de révision des listes électorales, peut-être
que c’est ça aussi qui a tout de même marqué des points au sein du
bureau politique, qui a beaucoup aidé les militants dans leur travail
sur le terrain.
Gérard Régnier : Pour
l’UC, nous tentons de faire en sorte que le FLNKS soit porteur de tous
les acquis qu’on a pu avoir et porteur aussi du combat qu’il reste à
mener. Nous souhaitons faire ces choses-là.
Si aujourd’hui on est sur le cadre d’une modification de la loi
organique, on le doit aussi aux démarches que le FLNKS a fait auprès de
l’ONU, que ça soit la mission de visite qu’est venue ici, que ça soit la
décision de l’assemblée générale de l’ONU de plus préciser le soutien
au FLNKS pour les années à venir, etc. Nous avons une vision de faire en
sorte que le BP et le FLNKS prennent toute sa place. C’est vrai que, et
là, les gens pourront critiquer les gens de l’UC, c’est quand même
grâce à l’UC que cette démarche de vision, elle reste, et que nous
continuons à vouloir faire vivre le BP fortement et qu’il trouve sa
place pour pouvoir, pour permettre à ce que le FLNKS dise, oriente et
éclaire les populations de ce pays pour préparer les trois ans à venir.
Sur l’histoire des listes électorales, sur l’histoire de la modification
de la loi organique, le FLNKS se doit encore de parler, se doit encore de dire des choses, et c’est important.
Journaliste : Le BP doit quand même être le moteur de l’organisation FLNKS ?
Gérard Régnier : Bien sûr, ça a toujours été la visée de l’UC. Il y a 4-5
ans de ça, nous avions comme mot d’ordre, c’était renforcer l’UC pour
renforcer le FLNKS, et c’est ce que nous avons toujours mis en évidence,
c’est ce que nous avons toujours souhaité. Ce congrès qui va, j’espère,
se tenir dans les trois mois à venir devra faire aussi le bilan des
élections de l’année dernière, qu’est-ce qui a bien fonctionné, qu’est-ce qui n’a pas fonctionné. Là, on se regarde, le Palika, l’UNI, l’UC, le PT, la DUS, etc., mais l’année dernière, c’est 12 mille voix en province Sud. Au-delà
du nombre d’élus, c’est12 mille personnes qui ont voté pour une seule
liste. Je ne sais pas si les gens s’en rendent compte. C’est des
chiffres qui parlent, qui sont là. On ne peut pas, d’un revers de la
main, balayer tout ça, c’est des choses trop importantes. Dans ce bilan,
il y a des points qui sont positifs, sur lequel
on a travaillé pendant toutes ces dernières années. C’est dommage qu’on
ne prenne pas le temps et c’est un peu le reproche. Je veux dire, quand
on fait un bilan, bien sûr il y a les points positifs, il y a des
points négatifs. Et quand on met en évidence les points négatifs, c’est
aussi pour ne pas les recommettre
à un moment ou à un autre. C’est ça l’intérêt d’un Congrès, c’est ça
l’intérêt de continuer à faire vivre les structures du FLNKS. Le BP se
doit de faire ce travail-là.
Si certains ne sentent pas cette nécessité, on va continuer à commettre
des erreurs, on va continuer à commettre des fautes, et c’est pas très
bon pour la lutte du peuple kanak.
Journaliste : Sur la démarche d'hier, vous n’êtes pas tout à fait d’accord avec ce qui s’est passé ?
Gérard Régnier : Personnellement,
je ne suis pas lié, à l’heure qu’il est, par ce communiqué. Les
dossiers sont sans contreparties, certains dossiers annoncés, et pour
l’instant, moi, je n’ai la main sur aucune autre information que celle-là.
Nous, nous avons des dossiers que l’on veut faire avancer, l’emploi
local dans le secteur public, l’emploi local dans le secteur privé qui
doit être revu, des avancées pour nos citoyens, la possibilité de
trouver une fiscalité plus juste, plus transparente. C’est pas
la peine de recréer des impôts et en même temps, de faire en sorte
qu’on recrée des niches fiscales, etc., il faut que les choses
s’éclaircissent. Pour l’instant, pas lié par le communiqué. Les dossiers
restent en l’état, c'est-à-dire que de fait, ils vont
se présenter à nous au fur et à mesure des travaux de ce gouvernement
et au Congrès, on les examinera. Quand les dossiers ne vont pas dans le
sens que l’on souhaite, eh ben, on fera les amendements, et s’ils ne
vont toujours pas dans le sens, on ne votera pas ces dossiers, donc à
charge à ce gouvernement de faire en sorte qu’il obtienne des majorités
pour pouvoir faire voter ce dossier. On n’est pas là sur une prise de
pouvoir ou sur un fonctionnement du gouvernement, nous sommes là pour
faire des avancées sociales, des réformes de fond, faire des avancées
politiques au niveau de ce pays, donc on va continuer à porter ça, à
moins que d’ici trois mois, quatre mois, au sein de l’UC, on y ait
retrouvé une position concordante à l’ensemble du mouvement.
Mais pour l’instant, ce n’est pas le cas.
Journaliste : C’est une décision qui va rendre encore incohérent le message des indépendantistes, des responsables aux militants ?
Gérard Régnier : Bien sûr. L’UC a parlé d’une démarche unitaire. Quand elle parlait de
cette démarche unitaire, elle parlait d’une démarche unitaire pour
l’ensemble des partis indépendantistes nationalistes. Mais il faut au
moins, dans un premier temps, la voir en interne. Quand Jean-Marie Tjibaou a signé l’Accord de Matignon, nous avons eu
deux comités directeurs, à N’Dé et à Conception. Je peux vous dire que
le premier comité directeur, ça a été très dur. Les militants de l’UC
sont venus et ont crié, se sont plaints, même à des moments, ont fustigé
Jean-Marie,
mais nous avons fait ce comité directeur. À la fin de la journée, nous
sommes repartis de ce comité directeur en disant, voilà l’analyse, voilà
la situation, voilà les différentes hypothèses. Et on se retrouve dans
un nouveau comité directeur pour savoir si l’UC est ok sur cette
signature ou pas. Le travail a été fait, Jean-Marie,
Yéyé, Caroline, sont partis sur le terrain, sont partis expliquer la
signature, sont partis expliquer le contexte, et puis nous nous sommes
retrouvés 15 jours après dans un comité directeur et là, l’UC a pris la
décision de porter les Accords de Matignon, toute l’UC, malgré aussi ce
qui s’était dit, quand Léopold, qui était je crois secrétaire général ou
secrétaire général adjoint à ce moment-là, avait dit dans les journaux français, "l’esclave vient de serrer la main de son maître".
Tout ça, on l’a effacé en parlant, en se retrouvant, et ensuite, on a
pris la décision. Il a fallu faire de même au sein du FLNKS. Nous avons
fait deux conventions extraordinaires pour que le FLNKS accepte la
signature de l’Accord de Matignon, avec une modalité de repasser par la
rue Oudinot et de continuer à négocier, point par point, certains
sujets, c’est ce qui a été fait. Je rappelle ça simplement pour dire que
nous aurions pu être dans la même démarche et c’est ce que moi, je
pensais à la sortie de la COMEX, en disant aux gens de la COMEX, on va
se retrouver, mais on va faire avancer les choses et de toute façon,
nous aurons à faire un choix à un moment ou à un autre, et nous
expliquerons ce choix, nous, l’UC, pas nous, les responsables, pas nous,
la moitié des responsables. Nous, les gens de l’UC.
C’est
un peu ça que je trouve regrettable. Quand on se veut dans une démarche
unitaire, on doit se donner la capacité de travail nécessaire pour
arriver à cette démarche unitaire.
Journaliste : Ce que fait monsieur Goa, c’est aussi un peu osé, en prenant certaines décisions à l’encontre de la COMEX, par exemple ?
Gérard Régnier : Je
suis secrétaire général du parti, je suis là pour porter les positions
du parti, et donc, des structures du parti. Le président est là pour
orienter, guider, viser, etc. Mais dans la mise en œuvre, on ne retrouve
pas l’ensemble du bureau pour cette mise en œuvre, c’est qu’il y a
quelque part une difficulté, c’est qu’il y a quelque part quelque chose
qui n’a
pas été fait, un travail pas total, pas complet. Que le président ait
des visées, des visions, et souhaite faire avancer les choses, c’est
très bien, mais on ne peut pas le faire les uns contre les autres, au
sein de l’UC. On doit le faire ensemble. J’espère que Daniel va se
ressaisir et revenir, parce que ce qui fait la force de l’UC, c’est, avant que ça soit les hommes et les femmes qui composent l’UC, ce sont ses structures. C’est
ça qui nous permet d’être encore aujourd’hui le parti le plus important
au niveau indépendantiste. C’est un des partis les plus importants au
niveau de ce pays, parce que nous avons des élus dans les trois
provinces, ce qui n’est pas le cas de Calédonie ensemble.
Journaliste : Quoi qu’il en soit, il y a un président du gouvernement et un viceprésident. À court terme, comment vous voyez les choses ?
Gérard Régnier : Il
faut se mettre au boulot. On va le voir sur la répartition des
secteurs. Il faut mettre en place la collégialité, il faut qu’il y ait
une répartition de ces secteurs,
que les gens se mettent au travail, qu’ils préparent les dossiers,
qu’ils les amènent au Congrès, et là, au Congrès, il y aura le débat
auprès des élus qui voteront ou qui ne voteront pas les textes proposés
par ce gouvernement.
Journaliste : Qu’est-ce que vous dites aux citoyens de ce pays ?
Gérard Régnier : J’ai
un peu la chance d’avoir vécu des moments très difficiles, des moments
très compliqués, donc, là, nous avons un moment difficile au sein de
l’UC, mais la capacité de l’UC, c’est de savoir se retrouver, de savoir
se parler. Et après, les hommes et les femmes qui sont à l’intérieur de
ce mouvement font des choix. Ce que je
suis tenté de dire à l’ensemble des populations, c’est qu’il faut
garder confiance. Il y a des moments, on peut commettre des erreurs, on
peut commettre des oublis, on peut trébucher un peu, mais on est homme
et femme, c'est-à-dire
qu’on a aussi nos défauts, et il faut savoir se ressaisir, se
reprendre, et revenir véritablement. Et si on veut créer une nation,
c’est vraiment dans cette capacité d’être confiants en nous, et d’être capables de se retrouver pour construire. Voilà, donc, confiance.
Journaliste : Monsieur Régnier, merci.