PARTI TRAVAILLISTE

KANAKY

vendredi 28 décembre 2018

Thomas Sankara fut assassiné lors d’un coup d’État organisé par celui qui était considéré comme son frère, Blaise Compaoré

Thomas Sankara (1949-1987) reste une figure adulée en Afrique. Un leader du panafricanisme, mais surtout un homme d’Etat charismatique et doué d’une intégrité à toute épreuve. Son engagement marxiste était-il pour autant une raison de le renverser et de l’assassiner ?
 J’avoue ma profonde sympathie pour cet homme et m’intéresse à son histoire. Je lis et relis Thomas Sankara parle, une compilation de ses discours et entretiens, réalisés durant son mandat de président du Burkina Faso (ancienne Haute-Volta), “le pays des Hommes Intègres” dont il était justement le meilleur représentant. [1]
 Sa chute et son assassinat brutal n’avaient provoqué paradoxalement que de peu de remous à l’époque, alors que les Burkinabés et le monde entier savaient qui était le coupable. Un rêve d’émancipation s’en était allé au profit d’un réalignement du Burkina Faso dans le cercle des Etats africains alliés de la France, des Etats-Unis et de “l’impérialisme” aux yeux des révolutionnaires marxistes.
 Dans sa biographie disponible sur Wikipedia, le coupable de sa mort est clairement désigné : “Le 15 octobre 1987, Thomas Sankara fut assassiné lors d’un coup d’État organisé par celui qui était considéré comme son frère, Blaise Compaoré. Plusieurs jours plus tard, il fut déclaré « décédé de mort naturelle » par un médecin militaire.” Je me souviens d’un documentaire consacré à Thomas Sankara diffusé sur la chaîne Public Sénat dans lequel, Blaise Compaoré, devenu le nouveau chef du régime, tirait un trait définitif sur l’ère Sankara ; l’homme avait un regard sombre et qui semblait cacher beaucoup de choses inavouables.
 Dans sa propre biographie sur Wikipedia, Blaise Compaoré, toujours chef de l’Etat burkinabé, y est clairement désigné comme celui qui a “assassiné son prédécesseur et ami Thomas Sankara pour avoir trahi l’esprit de la révolution”. On ne peut être plus explicite et personne n’est venu jusqu’à présent démentir cette grave accusation.
 En lisant le dernier numéro de Courrier International (n°926), je découvre son supplément d’été consacré aux “Drôles de couples” politiques et du show-bizz en général. Dans la catégorie des couples “infernaux”, le journaliste burkinabé Ernest Diallo du Journal de Jeudi de Ouagadougou revient dans un article sur le couple présidentiel Blaise et Chantal Compaoré : Chantal Terrasson des Fougères, fille d’une éminente figure politique ivoirienne, aurait été utilisée par le président ivoirien Félix Houphouët-Boigny (grand ami de la France) pour “appâter” le jeune capitaine et second de Thomas Sankara. Une tactique du président ivoirien visant, d’après le journaliste, à “infiltrer” le régime du fougueux et révolutionnaire Sankara par une alliance matrimoniale qui scellerait les intérêts de la Côte-d’Ivoire et du Burkina Faso, dès lors que ce pays sera présidé par Blaise Compaoré.
 Aujourd’hui, je vois et entends la “réconciliation” proclamée entre Blaise Compaoré et Laurent Gbagbo, l’actuel président (par intérim avant l’élection présidentielle de novembre prochain) de la Côte-d’Ivoire. Les deux hommes s’étaient fâchés durant la dernière guerre civile ivoirienne. Et je ne peux pas ne pas repenser à cette alliance matrimoniale et d’intérêts faite entre ces deux pays, avec certainement l’approbation de la France, au détriment de la vie de Thomas Sankara et de l’avenir du peuple burkinabé.

Notes :
 [1] Michel PRAIRIE, Thomas Sankara parle. La révolution au Burkina Faso (1983-1987), 2007, Pathfinder Books, New York, 480 pages, 26 euros.


31 juillet  2008