PARTI TRAVAILLISTE

KANAKY

jeudi 9 octobre 2014

L'élection municipale de Païta annulée


Frédéric de Greslan (à droite) avaient déposé deux recours contre l'élection d'Harold Martin (à gauche) à la mairie de Païta.
Photo Archives LNC

Contrairement à ce que préconisait le rapporteur public, le tribunal administratif de Nouméa vient d'annuler l'élection d'Harold Martin à la mairie de Païta. Deux recours avaient été déposés par Frédéric de Greslan, ancien candidat à la mairie de Païta, contre l'actuel maire. Le premier demandait que soit annulée la délibération du conseil municipal qui valide l’élection du maire, Harold Martin. Le second recours était la demande d’annulation de l’élection. Parmi les motifs avancés par Frédéric de Greslan, plusieurs inaugurations d’infrastructures communales organisées par la mairie pendant la campagne électorale.
 


Martin, l’annulation surprise

Le tribunal administratif a annulé l’élection municipale de Païta. Hier, les juges ont donné raison aux recours de Frédéric de Greslan. En cause : une interview d’Harold Martin sur Radio Djiido trois jours avant la fin de la campagne. Le clan Martin envisage de faire appel.
Les deux recours de Frédéric de Greslan ont été validés par le tribunal administratif. Conséquence : annulation totale de l’élection municipale.
Photos Archives LNC/Alexis Bédu

L’effet d’une bombe. L’annonce de l’annulation de l’élection municipale de Païta par le tribunal administratif doit encore résonner dans certaines têtes. Car cette annulation est une énorme surprise. Les juges ont décidé d’aller à l’encontre des conclusions du rapporteur public, qui préconisait lors de l’audience de la semaine dernière le rejet des deux recours de Frédéric de Greslan.


Drapeau. Dans leur décision, les juges du tribunal administratif pointent du doigt une interview d’Harold Martin donnée sur Radio Djiido le 26 mars dernier, soit trois jours avant la fin officielle de la campagne. Sur la radio indépendantiste, le maire sortant commentait l’opposition de Frédéric de Greslan à la présence du drapeau indépendantiste aux côtés du drapeau français. Il déclarait : « Ils ont dit que j’avais commis un acte inadmissible [en les montant]. » Il rapportait surtout que le matin même du mercredi 26 mars, le drapeau du FLNKS de la mairie de Païta avait été descendu. « Ça s’est passé entre cinq heures du matin et l’arrivée du personnel », expliquait-il à l’antenne, ajoutant : « De Greslan à la mairie sera source de problèmes. » Les juges ont considéré que Frédéric de Greslan avait été en mesure de répliquer, notamment sur d’autres antennes, mais ils précisent que « ces possibilités n’ont pas été suffisamment utiles pour lui permettre de combattre l’association faite par son adversaire ».

Polémique. Par ailleurs, selon les juges, ce nouvel élément de polémique électorale a pu altérer les résultats du scrutin. « En l’absence de liste de sensibilité indépendantiste au second tour, il importait pour chacune des deux listes (...) de s’assurer un report de voix optimal venant de l’électorat indépendantiste. » Au second tour, Harold Martin est arrivé largement en tête dans les deux bureaux (Mairie et Tamoa 2), qui avaient massivement voté indépendantiste au premier tour, récoltant plus de 60 % des voix. Le tribunal n’a pas statué sur les autres griefs du recours du candidat de Calédonie ensemble. Il a par contre annulé l’élection du maire et des adjoints, qui s’était déroulée à l’Arène du Sud, « par voie de conséquence ». Frédéric de Greslan s’est réjoui du jugement du tribunal administratif. « C’est une grande satisfaction. Nous nous sommes efforcés de respecter scrupuleusement le code électoral. Pour moi, la loi n’est pas une variable d’ajustement, il faut la respecter de façon précise. »

Bouillant. Dans le camp d’Harold Martin, qui reviendra ce week-end du Comité des signataires, on reste circonspect : « Il est extrêmement rare que le tribunal ne suive pas les conclusions du rapporteur public, explique Willy Gatuhau, premier adjoint au maire, il avait pourtant été sans ambiguïté. Nous prenons acte de la décision et nous avons déjà décidé de faire appel. » Le premier adjoint fait également valoir que « lors d’une interview à NC1ère, Frédéric de Greslan a répondu sur ce point des drapeaux. Et puis, il avait refusé un débat sur RRB où il aurait pu se défendre ». Bref, le conseil municipal de lundi prochain s’annonce chaud bouillant. Frédéric de Greslan a déjà annoncé qu’il n’y serait pas, d’autres obligations le contraignant à quitter le territoire.

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C’est le nombre de voix séparant Harold Martin et Frédéric de Greslan au second tour des élections municipales du 30 mars dernier. Le maire sortant avait recueilli 52 % des voix contre 48 % pour son adversaire. Harold Martin avait alors annoncé que ce mandat serait son dernier à Païta.

De nouvelles élections dans les prochains mois ?

Selon son premier adjoint, Willy Gatuhau, le maire sortant envisage de faire appel de la décision. Si le Conseil d’Etat ne casse pas le jugement du tribunal administratif de Nouméa, de nouvelles élections seront programmées et la campagne, qui ne s’est jamais vraiment arrêtée depuis le scrutin de mars, repartira de plus belle. S’il y a des élections, elles devraient avoir lieu au second semestre 2015. En effet, Harold Martin dispose d’un mois pour faire appel, et le Conseil d’Etat se donnera ensuite six mois pour statuer sur le jugement. « S’il le faut, nous irons aux élections, affirme Willy Gatuhau. On ne les craint surtout pas, car j’ai deux chiffres en tête : 52 % et 48 %. » Référence aux résultats du second tour du scrutin du mois de mars qui donnaient Harold Martin gagnant. Frédéric de Greslan se dit « prêt à entrer en campagne. On continue à se structurer sur Païta. On est rentré de plain-pied dans la vie municipale ». Le candidat de Calédonie ensemble repartira au front avec un allié de poids en la personne de Fiu Muliakaaka, qui avait récolté 8 % des voix au premier tour. Leurs adversaires pourraient changer. Deux candidats indépendantistes, Gérald At-Chee et Gustave Koindredi, risquent l’inéligibilité à cause de leurs comptes de campagne. Louis Mapou, lui aussi candidat en mars, assure que les indépendantistes se présenteront s’il y a scrutin. « Il faut que l’on travaille pour partir ensemble car l’objectif, c’est d’être présent au conseil municipal. » Du côté loyaliste, l’Union pour la Calédonie dans la France (UCF) n’est pas encore certaine de présenter un candidat. Si c’est le cas, ce ne devrait pas être Louisa Bréhé. « Tout dépendra de l’élection à Boulouparis », glisse Sonia Backès. Pascal Vittori, qui a rejoint l’UCF, se représentera si une nouvelle élection se profile. Déjà, début juin, le tribunal administratif avait annulé l'élection municipale à Boulouparis. Depuis, Alain Lazare, le maire, a fait appel auprès du Conseil d'Etat et, en attendant la fin de la procédure, la vie municipale suit son cours. Toutefois, certains voient déjà des signes précurseurs de campagne électorale. A. B.
 

Une autre affaire d’entre-deux tours

Une autre affaire autour des élections municipales de Païta est en cours. Celle de soupçons d’achat de votes durant l’entre-deux tours des municipales. C’est la plainte déposée par un adversaire politique qui a mis le feu aux poudres. Assez, en tout cas, pour qu’une enquête préliminaire soit ouverte. Harold Martin et son équipe de campagne sont suspectés d’avoir versé des sommes d’argent liquide à plusieurs familles influentes sur Païta, par l’intermédiaire de deux hommes, en échange de la promesse de votes. « Il faut cependant faire très attention à la manipulation, nuance une source proche de ce dossier. C’est une boule puante lancée également entre deux tours qui n’est pas forcément véridique. » Les enquêteurs disposeraient pourtant de certains éléments. Plusieurs personnes ont déjà été entendues. A ce stade des investigations, aucune information judiciaire n’est en passe d’être ouverte, l’enquête préliminaire étant réalisée par des services de police judiciaire. « C’est malheureusement l’une des armes politiques pour jeter le discrédit, assure cette même source. D’autres ont été également salis sans raison. » D’autres hommes politiques ont déjà eu à se justifier suite à des plaintes déposées par un adversaire politique. Parmi eux, Philippe Gomès, poursuivi dans le dossier des contrats PPIC (Plan provincial d’insertion citoyenne) ouvert en 2010, suite à une plainte de Didier Leroux. L’enquête portait sur les conditions dans lesquelles le président de la province Sud de l’époque avait accordé ces emplois d’insertion ainsi que des subventions à plusieurs associations wallisiennes et futuniennes. Le tout à la veille des élections provinciales de 2009. En apprenant le non-lieu au mois d’août dernier, le principal intéressé déclarait dans nos colonnes que « cette cabale politico-judiciaire était destinée à me nuire, voire même à obtenir mon inéligibilité ».
J.-F. G.


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