On
aurait pu croire que le texte allait être voté avec facilité et
rapidement. En effet, le projet de loi du pays instaurant une protection
de l’emploi local dans la fonction publique calédonienne, proposé hier
matin au Congrès, reprenait dans les grandes lignes ce qui a été adopté
en 2010 pour l’emploi dans le secteur privé.
Règle de base, une
préférence accordée aux citoyens et aux personnes justifiant de dix ans
de résidence, avec des atténuations pour les secteurs où le recrutement
est difficile : trois ou cinq ans de résidence, voire aucune condition
quand il y a carence sur le marché local.
Passoire
Mais les deux groupes indépendantistes du Congrès sont arrivés
avec une quarantaine d’amendements et l’intention affichée de resserrer
tous les boulons. Suppression des paliers de trois et cinq ans pour les
non-citoyens, le critère de dix ans de résidence retenu quelle que soit
la difficulté de recrutement. Et, en cas de carence sur le marché local
(par exemple pour le recrutement d’un ingénieur spécialisé ou d’un
chirurgien hospitalier), emploi temporaire d’une personne venue de
l’extérieur jusqu’à ce qu’un Calédonien étudiant atteigne les
qualifications requises. Leur argument ? La loi protégeant l’emploi
local dans le privé serait une passoire, et il ne faut surtout pas la
transposer au public.
Un texte d’une telle importance politique
supposant le consensus maximum, le président du Congrès a suspendu la
séance pour que les élus se retrouvent autour d’une table et tentent de
trouver un compromis.
Evolution
Finalement, il a été convenu que le quota de postes de
catégorie A (le grade le plus élevé) réservé aux locaux serait porté de
50 à 60 %, celui des catégories B (intermédiaire) de 70 à 80 %. Louis
Kotra Uregei a suggéré que pour les fonctionnaires de catégorie C
(faiblement diplômés), la porte soit totalement fermée aux non-citoyens
et à ceux qui n’ont pas dix ans de résidence. Mais c’est contraire à la
Constitution. Il faut au moins une place ouverte.
Il a également
été convenu que ces quotas seraient susceptibles d’évoluer en fonction
de l’élévation du niveau de qualification des jeunes Calédoniens (Ils
sont 3 000 à l’université de Nouville, et 2 500 étudiants en Métropole).
On
s’achemine donc vers un mécanisme relativement souple. Chaque année,
lors de l’organisation des concours administratifs, il sera tenu compte
des statistiques des trois années précédentes. Sur proposition de
Philippe Gomès, une évaluation sera faite du nombre de nouveaux diplômés
susceptibles d’être candidats.
Conjoints
Autre pierre d’achoppement, le statut des conjoints. Dans le
projet, les conjoints de citoyens ou de personnes justifiant de dix ans
de résidence bénéficient des mêmes droits à l’emploi.
Il s’agit,
selon les loyalistes, de répondre à un principe de réalité. Souvent, des
jeunes partent faire leurs études et reviennent avec un conjoint qui
doit pouvoir s’insérer dans la société. Le cas est d’ailleurs prévu dans
la loi sur l’emploi local dans le secteur privé. Mais là aussi, les
deux groupes indépendantistes sont hostiles à cette mesure et ont choisi
de voter contre. Le dispositif a donc été adopté seulement par 28 voix
contre 25.
Reste que d’ajustements en suspensions de séances pour
réécrire tel ou tel morceau de phrase, l’ensemble du texte a été voté à
l’unanimité.