PARTI TRAVAILLISTE

KANAKY

dimanche 3 décembre 2017

Pour cela Mr le 1 er ministre, il faudrait des listes électorales sincères ...

Entretien. Pour sa première visite, le Premier ministre souhaite faire le point sur les travaux engagés en vue de la future consultation. Son objectif majeur est de permettre aux jeunes de « cheminer dans la paix civile et la prospérité ».
Le Premier ministre assure être confiant et résolu avant cette visite où il va multiplier les rencontres  sur la Grande Terre, à Lifou mais également à Tiga.
Le Premier ministre assure être confiant et résolu avant cette visite où il va multiplier les rencontres sur la Grande Terre, à Lifou mais également à Tiga. 

Les Nouvelles calédoniennes : Dans quel état d’esprit abordez-vous ce premier voyage en Calédonie ?
Je suis confiant et résolu. J’ai eu, depuis mai dernier, de nombreux échanges à Paris avec les responsables politiques calédoniens mais aussi avec des personnalités de la société civile. J’ai souhaité très rapidement pouvoir prolonger cette relation en allant à la rencontre des Calédoniennes et des Calédoniens. Je vais donc continuer le dialogue politique engagé depuis mai dernier et rencontrer des jeunes, notamment celles et ceux qui sont engagés au sein du Régiment du service militaire adapté, ainsi que des acteurs du monde économique, en particulier de la filière du nickel. Au-delà de ces rencontres, je souhaite faire le point sur les travaux qui sont engagés pour préparer
la consultation. Lors du dernier
Comité des signataires, un groupe de travail a été missionné et, à moins d’un an de l’échéance pour le scrutin, ses travaux sont essentiels.
Aller à la rencontre des Calédoniens, c'est aussi faire un bilan du chemin parcouru ?
Je veux aussi prendre la mesure des acquis de ces trente dernières années : la reconnaissance de l’identité Kanak et de sa place, le rééquilibrage entre les territoires, leur développement économique et social, l’équilibre des institutions, bref, tout ce qui contribue au « fait calédonien » comme disent certains observateurs. Je tenais aussi à ce que ce déplacement – mon premier en Nouvelle-Calédonie – comporte des temps de recueillement. Nous sommes héritiers d’une histoire : d’une histoire immédiate avec Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou, et d’une histoire plus ancienne avec le tirailleur Kalepo Wabete, dont je saluerai la mémoire à Tiga.
Quels sont les principaux enseignements que vous avez tirés de ce Comité des signataires ?
Tout au long de ce seizième Comité des signataires de l’Accord de Nouméa, chacun des partenaires a témoigné d’un sens élevé des responsabilités. J’oserais même parler d’une responsabilité historique. Cette attitude m’a marqué d’autant qu’elle était associée à une forme d’humilité, de prudence devant l’ampleur de la tâche. J’ai aussi noté une forte attente à l’égard de l’État. Je l’avais d’ailleurs mesurée dès les premiers échanges que j’ai eus avec nos partenaires calédoniens. L’Etat doit assumer d’être pleinement acteur du processus en cours en Nouvelle-Calédonie. Il doit également l’être dans ses autres responsabilités : l’exercice des compétences régaliennes, comme la sécurité, la défense ou la justice, l’accompagnement des collectivités de Nouvelle-Calédonie dans le cadre des contrats de développement, ou encore le soutien à la filière du nickel.
Considérez-vous que le rôle de l’Etat est aussi de faciliter le dialogue ?
Surtout, l’État est acteur du processus mais aussi acteur du dialogue entre les partenaires. La rencontre voulue par le président de la République au début de la semaine du Comité des signataires de l’Accord de Nouméa a été à cet égard un symbole fort : pour la première fois, à l’Elysée, les délégations étaient invitées à s’exprimer sur leur vision et leurs attentes.
Pensez-vous avoir posé les bases d’une « méthode Philippe » ?
L’écoute, le respect du partenaire et de sa parole sont des principes fondamentaux à mes yeux. Ils étaient au cœur du dialogue et des négociations lors du Comité des signataires réuni le 2 novembre dernier. Je ne prétends d’ailleurs pas en avoir le monopole, car nous avons tous été acteurs ce jour-là. Les discussions ont été longues mais elles ont été productives et ont permis de construire un compromis : chacun y a apporté sa pierre, l’Etat bien sûr, et chaque délégation. Enfin, le respect c’est aussi la clarté. Avec Annick Girardin, ministre des Outre-mer, j’ai voulu indiquer la position de l’État, à chaque fois que cela était nécessaire. L’Etat acteur, c’est un État qui prend ses responsabilités et qui fait part de ses orientations et de ses attentes ; c’est aussi un État qui dit ce qui n’est pas possible. C’est sur cette base de vérité et de franchise que nous pouvons avancer en confiance.
Que vous inspirent les propos virulents de Daniel Goa et Louis Kotra Uregei ?
Je suis avec une grande attention les prises de position des responsables politiques en Nouvelle-Calédonie et les propos auxquels vous faites allusion ont été prononcés dans un contexte particulier, quelques jours seulement après le XVIe Comité des signataires, dans un temps qui était encore celui de l’explication des conclusions de ce comité. Ils témoignaient d’une inquiétude sur le déroulement de la consultation, plus particulièrement sur les inscriptions d’office et sur le fait que ces inscriptions nécessitaient de modifier la loi organique. J’ai entendu les craintes soulevées par une telle modification mais sur ce sujet comme sur les autres, l’Etat demeurera un acteur parfaitement loyal et totalement engagé pour « garantir la légitimité et la sincérité du résultat du scrutin » selon les termes du relevé de conclusions. Tout sera mis en œuvre pour identifier chaque personne qui ne s'est pas inscrite sur les listes électorales et qui a vocation à l'être, grâce à la poursuite du travail de fiabilisation des fichiers informatiques utilisés pour les inscriptions d'office. J’observe d’ailleurs que les forces politiques représentées au Congrès sont parvenues à renouveler la semaine dernière l’accord politique conclu lors du comité. C’est important de le rappeler.
Comment faire pour éviter cette radicalisation du discours ?
Nous avons une responsabilité particulière dans cette période d’avant - consultation. Nous devons mieux expliquer ce qui s’est passé, et en premier lieu, l’histoire de cette consultation. Cela peut se faire à travers une meilleure appropriation collective de l’Accord de Nouméa, ne serait-ce qu’en relire le préambule. C’est aussi l’enjeu du bilan de l’Accord de Nouméa que nous avons décidé de réaliser lors du dernier comité des signataires. Faire la pédagogie de la consultation, c’est aussi dire ce qu’elle n’est pas. Elle n’est pas un référendum pour effacer le passé, encore moins pour revenir à un état passé : il y a des acquis irréversibles. Au lendemain du référendum, la grande ambition partagée que constitue la construction du destin commun, ce vivre ensemble qui doit unir les uns et les autres, restera l'horizon que chacun doit chercher à atteindre. Quant à la manière de procéder, ne nous interdisons pas d’être innovants ! Le groupe de travail qui œuvre à l’organisation de la consultation aura à formuler des propositions en ce sens. Pour ma part, je suis convaincu qu’il y a la nécessité et le besoin d’avoir une instance de référence pendant la campagne qui pourrait être, en quelque sorte, le gardien des valeurs communes.
30 ans plus tard, vous avez pour mission d’amener à son terme le processus engagé par Michel Rocard. Que ressentez-vous personnellement ?
Je ne fais pas miens les mots de « terme du processus » ou de « sortie de l’Accord ». Non pas que je veuille nous enfermer dans un éternel présent de l’Accord. Le préambule scande d’ailleurs le passé, le présent et l’avenir, qui, en 1998, avait pour nom « l’identité dans un destin commun ». Or nous sommes déjà dans cet avenir de l’Accord avec des réalisations concrètes et des avancées objectives, qui illustrent ce fait calédonien : la reconnaissance de l’éminence de l’identité Kanak et de la place des autres cultures, le rééquilibrage entre les territoires, la responsabilité de la Nouvelle-Calédonie sur un grand nombre de politiques publiques ou encore le rang de la Nouvelle-Calédonie dans le Pacifique Sud aux côtés des Etats et territoires de cette zone…
L’engagement est donc tenu  selon vous ?
Ce que je veux dire, c’est que je conçois le processus initié par Michel Rocard, Jacques Lafleur et Jean-Marie Tjibaou, comme la trace d’un chemin : notre responsabilité, aujourd’hui, est de continuer à avancer ensemble et, en avançant, de poursuivre ce chemin. Il est question d’accomplissement d’une promesse et des paroles échangées et non pas d’achever un parcours. C’est ce que nous devons aux jeunes générations de Nouvelle-Calédonie : leur laisser la possibilité à leur tour de cheminer dans la paix civile et la prospérité.