L'ONG
Human Rights Watch s'apprête à publier un rapport accablant sur l'appui
des autorités françaises au pouvoir du dictateur tchadien Hissène Habré
Le
30 mai, l’ancien dictateur tchadien Hissène Habré a été condamné à la
prison à perpétuité pour crimes contre l’humanité, crimes de guerres,
tortures et viols. A la tête de l’Etat de juin 1982 à décembre 1990,
Habré s’est largement appuyé sur le soutien de la France pour asseoir
son pouvoir. C’est ce que démontre, à travers des documents et des
témoignages exclusifs, un rapport de l’ONG Human Rights Watch en
préparation et dont le journal « Le Monde » a publié plusieurs extraits.
Charniers et Transall
Selon cette enquête, la complaisance de la France vis-à-vis de l’ex
dictateur commence avant son arrivée au pouvoir. Dès mars 1982,
« conscientes de la monté en puissance des FAN, les autorités françaises
(…) se sont rapprochées des représentants des FAN » note le rapport. Et
ce malgré la découverte en 1980 de charniers à ciel ouverts remplis de
victimes fusillées par les forces d’Habré autour de sa demeure dans la
capitale N’Djamena.
Après l’arrivée d’Habré au pouvoir, plusieurs unités de l’armée
française sont déployées sur le sol tchadien tout près des zones du nord
du pays où des centaines de combattants de Goukouni Oueddeï (opposant à
Habré soutenu par la Libye de Kadhafi) sont alors “victimes
d’exactions, de mauvais traitements, de tortures et d’exécutions
sommaires” commises par les FANT. Par ailleurs, le rapport précise que
le 11 juillet 1983, “32 mercenaires, sélectionnés par René Dulac (…) ont
décollé de l’aéroport du Bourget” en direction du Tchad. “Dual a reçu
ses ordres lors d’une réunion de crise organisée par la DGSE dans les
locaux du ministère de la coopération. Le projet est suivi de près par
Jean-François Dubos, directeur adjoint du cabinet du ministre de la
défense Charles Hernu, ainsi que par Guy Penne et François de
Grossouvre, conseillers de Mitterrand”.
La complicité des autorités françaises avec le régime s’appuie
également sur la mise à disposition d’avions “Transall de l’armée
française pour transporter des prisonniers”. “Les avions français
étaient mieux pour garder les choses secrètes” confie un technicien de
l’armée de l’air tchadienne aux chercheurs de HRW.
Tchad-DGSE, les liaisons dangereuses
Lors de la répression violente menée par les forces tchadiennes
contre les rebelles du sud du pays de 1982 à 1985, Paris ne
suspendra jamais son aide aux autorités du pays. Objectif principal :
dédouaner les troupes française de toute responsabilité. Le 4 décembre
1984, François Mitterrand écrit à Habré : “Il serait grave que nous
semblions, de quelque manière que ce fût, associés à des excès commis
par des troupes régulières tchadiennes que nous équipons et dont nous
entrainons les cadres”.
Enfin, la proximité entre la DGSE et la Direction de la documentation
et de la sécurité instaurée par Habré et coupable de nombreuses
exactions laisse penser que les autorités françaises de l’époque
n’ignoraient pas les abus commis par le régime. Selon un témoignage
écrit par un ancien agent de la DGSE, Claude Faure, présent lors de la
création de la DDS, une équipe de la DGSE était détachée auprès de la
DDS tchadienne. “Les membre de cette équipe ont pour mission de
conseiller et de former les personnels de ce service”.