Des journalistes de Port-Vila viennent de publier de nouveaux éléments
sur la saisie par la douane vanuataise de six conteneurs de bois de
santal en provenance de Nouvelle-Calédonie. Une affaire rocambolesque
aux enjeux très lourds.
Le Vanuatu Daily Post s’est
attardé samedi, tout comme le Vanuatu Digest avant-hier, sur la saisie
des conteneurs. « Belair Farm a reçu l'approbation du ministère de la
Biosécurité pour importer les 68 tonnes de bois de santal de l'exportateur de Nouvel Copie Site Vanuatu Daily Post
Pour le site d’information Vanuatu Digest, « c'est une grosse affaire
». Tandis que « le directeur des douanes, Benjamin Malas, a qualifié la
question de « sensible et sérieuse » », rapporte le Vanuatu Daily Post.
Les journalistes de Port-Vila viennent de rassembler divers détails
d’une histoire troublante. Un démêlé dont quelques bribes avaient gagné
le Caillou l’an dernier. Six conteneurs de bois de santal importés de
Nouvelle-Calédonie, ont été saisis par les douaniers vanuatais. Valeur
déclarée, 208 millions de vatus, soit un peu plus de 210 millions de
francs, selon les journaux voisins qui avancent un nom : Sylvie
Qenegeie. Elle serait le maillon entre la société calédonienne Santal
D'Zyl et l’entreprise du Vanuatu Belair Farm qui est vouée, dans
l’épisode, à importer du bois de santal pour être réexporté. Vers où ?
Beaucoup pensent à la Chine. D’après le Daily Post, la dame citée
travaille avec une association de Lifou.
Ces six conteneurs sont arrivés au Vanuatu en mai 2016 et ont fait
l’objet d’un mandat de perquisition en septembre. Le motif semblerait
être une fausse déclaration. Sylvie Qenegeie conteste la saisie, et a
demandé une assistance « pour empêcher la vente » de la marchandise,
soulignent les journalistes.
Via l’Afrique ?
L’affaire n’est que la suite d’un autre feuilleton, très animé lui
aussi début 2016 en Nouvelle-Calédonie. Le gouvernement, après avoir
ratifié l’interdiction absolue des exportations du bois de santal, avait
accordé une dérogation exceptionnelle. Selon des observateurs, 200
tonnes de la noble matière naturelle avaient alors été ramassées, et
quatorze conteneurs ont quitté le pays. Sept seraient passés par
l’Afrique - certains parlent de l’Ouganda - avant de rejoindre,
semble-t-il, la Chine. L’autre moitié a filé vers le Vanuatu, archipel
d’une future saisie par la douane. Conséquence, les coupeurs de santal
de Lifou, attirés par un réseau à l'export aux prix plus alléchants,
n’auraient toujours pas été payés. L’exportation sans cadre, ou du moins
« compliquée » visiblement, soulève par ailleurs des questions
légitimes sur la traçabilité du bois, la provenance de l’argent en jeu,
ou encore le sérieux du reboisement.
Tension à Port-Vila, mais la sérénité n’est aussi pas retrouvée ici.
La « filière chinoise », comme la dénomment des connaisseurs du dossier,
proposerait un prix de 2 000 à 3 000 francs le kilo. Séduits, les
coupeurs drehu ont alors quitté la voie de la distillerie de Maré, aux
tarifs autour de 700 francs le kilo. Réputée pour sa technologie, ou
encore le prestige de ses clients parfumeurs - Guerlain, Dior, Chanel -,
la distillerie Serei No Nengone, pilotée par Jean Waikedre, ne « tourne
» donc aujourd’hui qu’avec le bois de Tadine et des autres districts.
La gestion durable de la société, la création d’emplois, et les
retombées économiques locales, sont pourtant des atouts régulièrement
avancés.
Un geste de pardon entre Lifou et Maré avait été annoncé pour le
début d’avril 2016. La coutume n’a pas encore eu lieu. Du temps, il va
sans doute en falloir.
Repères
Enchaînement d’événements
- Le 8 décembre 2015, en raison de la disparition « dramatique » de ce trésor végétal dénommé santal mais aussi de la nécessité d’augmenter la transformation locale pour plus de valeur ajoutée, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie décide d’interdire toute exportation de bois de santal brut sous quelque forme que ce soit.
- Le 8 décembre 2015, en raison de la disparition « dramatique » de ce trésor végétal dénommé santal mais aussi de la nécessité d’augmenter la transformation locale pour plus de valeur ajoutée, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie décide d’interdire toute exportation de bois de santal brut sous quelque forme que ce soit.
- Le 18 février 2016, un courrier de désengagement de la SARL Takone,
émanant des trois grandes chefferies de Lifou, est transmis à la
province des Îles.
- Fin février, des coupeurs, regroupés sous le couvert de
l’association « Drehu Tapaka », manifestent leur mécontentement devant
la province des Îles.
- Mercredi 9 mars 2016, sous la pression de l’institution des
Loyauté, l’exécutif calédonien accorde une dérogation exceptionnelle à
l’arrêté du 8 décembre 2015. Ainsi, jusqu’au 30 avril 2016, les stocks
de bois coupés avant le début décembre de l’année passée, pourront être
écoulés.
Valeurs
Une note du gouvernement diffusée le 8 décembre 2015 éclairait le marché : un chiffre d’affaires annuel global de plus de 550 millions de francs pour les distilleries locales, soit environ 250 millions pour l’île des Pins et 300 millions pour les Îles Loyauté; et plus de 40 emplois en CDI et temps plein.
Une note du gouvernement diffusée le 8 décembre 2015 éclairait le marché : un chiffre d’affaires annuel global de plus de 550 millions de francs pour les distilleries locales, soit environ 250 millions pour l’île des Pins et 300 millions pour les Îles Loyauté; et plus de 40 emplois en CDI et temps plein.