La France est le seul pays européen à maintenir une capacité 
militaire permanente dans la zone Asie-Pacifique, avec les Forces Armées
 de Polynésie Française (FAPF) de celles de Nouvelle-Calédonie (FANC). 
Et cela est un atout dans la mesure où cette région est stratégique à 
plus d’un titre. « Notre prospérité est liée à celle de l’Asie, toute 
crise dans cette zone affecterait nos intérêts », affirmait, en avril, 
Philippe Errera, le directeur aux affaires stratégiques (DAS).
Le dernier Livre blanc sur la Défense et la sécurité nationale 
(LBDSN) a également évoqué importance en soulignant que la zone 
Asie-Pacifique « joue un rôle déterminant dans la mondialisation » en 
étant « le principal foyer de croissance du monde » mais constitue aussi
 « l’une des régions où les risques de tensions et de conflits sont les 
plus élevés ».
Mais cette région est vaste… Aussi, un rapport du Sénat
 s’est plus particulièrement intéressé à l’Asie du Sud-Est, dont les 10 
États qui la composent constituent la 4e puissance économique mondiale, 
avec 110 milliards d’investissements étrangers par an et des besoins 
importants. « Ils s’affirment, de plus en plus, comme des acteurs 
globaux sur la scène internationale », explique le document.
« Nous avons désormais en Asie du Sud-Est autant de ressortissants 
qu’en Afrique de l’Ouest, autant d’intérêts économiques qu’en Chine, et 
en plus nous partageons une vision commune des relations 
internationales », a fait valoir le sénateur Jean-Claude Peyronnet 
(Haute-Vienne), co-auteur du rapport. « Les opportunités sont immenses 
pour nos entreprises : défense, aéronautique, automobile, 
infrastructures, énergie, agro-alimentaire, santé, économie maritime… »,
 a surenchéri son collègue Jean-Claude Requier (Lot).
En outre, le document relève qu’ »avec une spectaculaire inversion – à
 son avantage – de la relation de dépendance économique avec l’Occident,
 l’Asie du Sud-Est émergente est le creuset des évolutions géopolitiques
 actuelles, et notamment de la remise en cause des principes 
« occidentaux » du droit international (liberté de circulation en mer, 
notamment…) ».
Seulement, cette partie du monde a été négligée par la France depuis 
une vingtaine d’années. Il y a 15 ans, l’on comptait ainsi 450 
entreprises françaises implantées en Indonésie contre seulement 150 
actuellement, alors que ce pays connaît une croissance économique 
rapide. « sommes depuis 20 ans des bailleurs d’aide publique au 
développement dans ces pays en rattrapage accéléré : où sont les 
résultats sur le plan économique? », s’est demandé Christian Cambon, 
co-rapporteur.
Aussi, étant donné l’importance de l’Asie du Sud-Est, le rapport 
estime que la France doit jouer aux mieux ses atouts afin qu’elle 
saisisse les opportunités offertes par cette région. Pour rappel, Paris a
 des liens profonds avec la Malaisie et des partenariats stratégique 
avec Singapour, l’Indonésie et le Vietnam. Mais cela n’est évidemment 
pas suffisant.
« Les ‘géants’ de l’Asie (Inde, Chine, Japon) ne doivent pas nous 
cacher l’Asie du Sud-Est », estime le rapport des sénateurs, qui 
regrette que la « France peine à définir ses objectifs, à maintenir ses 
priorités dans la durée, et à redéployer ses moyens, notamment 
diplomatiques, vers cette zone émergente ».
Aussi, les sénateurs ont défini trois priorités : définir une 
stratégie à haut niveau en s’appuyant sur 3 États pivots (Malaisie, 
Indonésie, Singapour) et sur l’ASEAN (Association des nations de l’Asie 
du Sud-Est), « faire de la diplomatie économique le fer de lance » du 
pivot, notamment autour des « besoins de ‘l’économie verte’ et de 
‘l’économie bleue’ » avec l’objectif d’optimiser les retombées 
économiques de 20 ans d’aide au développement et, enfin, de « s’engager 
pour la sécurité » en élargissant la coopération militaire 
(contre-terrorisme, échanges d’officiers, exercices, escales…) et en y 
maintenant des « moyens crédibles ».
Pour cela, le rapport a établi une feuille de route à court et moyen 
terme. Ainsi, au cours des 6 prochains moins, il suffirait d’adhérer à 
l’organise de lutte contre la pirateurie ReCAAP « en réglant de façon 
pragmatique la question de la traduction en langue française » et de 
« lancer un audit global des différents programmes de personnalités 
d’avenir pour l’Asie du Sud Est ».
Le programme à un an est plus étoffé et met l’accent sur la 
diplomatie et le rétablissement de l’influence française. Pour 
commencer, il propose de faire du « rattrapage de nos positions 
économiques en Indonésie et au Vietnam » la « priorité numéro 1″ ainsi 
que d’avoir un rythme soutenu de visites officielles dans la région 
(déplacement du ministre de la Défense en Malaise, tournée 
présidentielle).
L’accent est aussi mis sur les questions de sécurité, avec la 
pérennisation de la présence française au au dialogue Shangri-La de 
Singapour, la signature du protocole sur la création d’une zone exempte 
d’armes nucléaires en Asie du sud-est (traité SEANWFZ), la proposition à
 la Kuala Lumpur d’un partenariat stratégique et le renforcement de la 
coopération de défense « en visant un pourcentage de 15% à 20% dévolus à
 l’Asie du Sud-Est » et en répondant favorable aux demandes de formation
 des armée locales.
Enfin, d’ici deux ans, la feuille de route des sénateurs préconise 
d’avoir un diplomate à plein temps auprès de l’ASEAN, de rééquilibrer 
les moyens diplomatiques vers l’Asie, et plus particulièrement 
l’Indonésie, d’assurer une « une présence de la Marine Nationale 
régulière et visible en Asie du Sud-Est, en privilégiant notamment, 
outre les missions des Frégates de surveillance, le déploiement de 
bâtiments modernes, puissants et visibles comme les Bâtiments de 
projection et de commandement (BPC), voire les sous-marin nucléaire 
d’attaque » (ndlr, un SNA n’est pas ce qui se fait de mieux en matière 
de visibilité) et d’appuyer « en tant que membre du Conseil de Sécurité,
 le rôle global joué sur la scène internationale par la Malaisie, 
Singapour et l’Indonésie (négociations climat, zone sans armes 
nucléaires…).
