Publié le lundi 07 mars 2016
Plusieurs milliers de demandes de radiation
des listes provinciales ont été déposées devant les commissions
administratives par des proches de l’UC. Le « litige électoral » est
clos sans l’être.
Les commissions administratives spéciales sont
composées de cinq membres (plus un observateur) dont deux tiers
électeurs, un indépendantiste et un loyaliste, qui ont la faculté de
demander des radiations.
On croyait la hache de guerre enterrée entre indépendantistes
et loyalistes. Erreur. La guerre des listes électorales est bel et bien
relancée. Depuis mardi dernier, les tiers électeurs* indépendantistes
qui participent aux commissions administratives de révision des listes
électorales provinciales ont, comme en 2015 et comme en 2014, formulé
des centaines de demandes de radiation d’électeurs.
Pourtant, à
l’issue du Comité des signataires des 4, 5 et 6 février dernier, le
contentieux électoral avait été présenté comme réglé. Lors du comité
directeur de l’Union calédonienne, qui s’est tenu le samedi 27 février à
Saint-Louis, le président du mouvement avait déclaré dans son discours
introductif que l’affaire était close.
Mais, à l’évidence,
d’autres composantes de l’UC ne l’ont pas entendu de cette oreille, pas
plus qu’une partie de la base militante, et d’autres formations alliées à
l’UC, comme la DUS et le Parti travailliste.
Dès l’ouverture des
commissions administratives, mardi, Madeleine Ounou, une des chevilles
ouvrières de la « commission politique et citoyenneté du FLNKS et
Nationalistes », à l’origine des demandes de radiation de 2014 et 2015,
déclarait qu’elle ne se considérait pas comme tenue par les conclusions
du Comité des signataires qui sont politiques, mais n’ont pas de
conséquences juridiques. « La loi organique n’a pas changé, et la
jurisprudence de la cour de cassation reste la même » rappelle-t-elle.
Actualité
Gérard
Reignier, secrétaire général de l’UC, affiche le même raisonnement. «
La question réglée politiquement, cela signifie qu’elle ne sera pas
reposée lors des prochains Comités des signataires. Pour autant les
problèmes juridiques posés par les personnes non inscrites sur la liste
de 1998 sont toujours d’actualité. »
La nouvelle vague de demandes
de radiation n’est donc qu’une demi-surprise. L’Union calédonienne et
ses satellites avaient fait de cette entreprise un de leurs chevaux de
bataille pendant des années, et sa base militante aurait assez mal
digéré l’abandon pur et simple des armes. De plus, rien dans le relevé
de conclusions du dernier Comité des signataires n’interdit aux « tiers
électeurs » qui participent aux commissions administratives de révision
des listes de demander des radiations, puis d’exercer des recours en
justice si ces demandes leur sont refusées. Et si interdiction il y
avait, ce serait illégal.
Reste à savoir ce à quoi ces nouvelles
demandes aboutiront. On sait qu’à la demande du Comité des signataires
de juin 2015, un « expert de confiance » a été nommé pour quantifier le
litige électoral et distinguer les situations de différentes catégories
d’électeurs. Il en ressort que 1 039 personnes risquent la radiation si
elles ne fournissent pas les justificatifs de leur arrivée avant
novembre 1998. Pour elles, le risque est bien réel, indépendamment même
de l’existence, ou non de demandes de radiation.
Mais pour les
autres catégories d’électeurs, l’issue devrait être la même qu’en 2014
et 2015, c’est-à-dire un rejet des demandes de radiation.
Question
suivante, est-ce qu’ensuite les tiers électeurs indépendantistes des
commissions exerceront des recours en justice ? Sans doute pas. En tout
cas pas massivement comme ce fut le cas en 2014, ce qui avait engorgé le
tribunal, provoqué l’agacement des magistrats, et avait débouché sur
des rejets massifs.
Mais le couvert sera sans doute remis en 2017.
*Les membres des commissions de révision désignés par les deux tendances politiques
Trois années de bagarre administrative
Ce litige résulte de 17 ans d’incompréhension et de malentendus.
C’est maintenant la troisième année que des membres de l’UC, du Parti travailliste et de la DUS tentent de faire exclure des électeurs inscrits sur les trois listes électorales des provinciales (Sud, Nord et îles, mais principalement celle du Sud). Ils y sont parvenus à quelques dizaines d’unités sur 6 000 demandes initiales.
Pour comprendre l’origine de ce formidable malentendu, il faut remonter au référendum du 9 novembre 1998 qui ratifie l’accord de Nouméa.
A l’époque, les documents de campagne édités par l’Etat expliquaient que, pour être inscrit sur les listes électorales des provinciales, il fallait justifier d’au moins dix ans de résidence. C’était le corps glissant.
Mais dès 1999, plusieurs responsables indépendantistes ont réclamé que ce corps soit gelé, et que les personnes arrivées après le 8 novembre 1988 ne puissent définitivement pas s’y inscrire.
En 2003, ils ont été entendus par le président Jacques Chirac à l’occasion d’un Comité des signataires houleux tenu à Koné. Et en 2007, juste avant la fin du mandat présidentiel, le Parlement réuni en Congrès à Versailles avait entériné le principe du gel.
Mais dans la foulée, la cour de cassation a fait une lecture littérale de l’ensemble des dispositions de l’article 188 de la loi organique, et en a déduit que si l’on n’était pas inscrit sur la liste générale de 1998, il fallait être arrivé avant 1988.
D’où les 6 000 demandes de radiation déposées en 2014, avec pratiquement autant de recours devant la justice, lesquels ont été en grande majorité rejetés en raison des règles de preuve.
Il y a quelques jours, Gilbert Tiuyénon, membre UC du gouvernement, déclarait sur RRB que la clôture politique du sujet ne signifiait pas que lui et ses alliés resteraient silencieux au moment de la tenue des commissions électorales.
C’est maintenant la troisième année que des membres de l’UC, du Parti travailliste et de la DUS tentent de faire exclure des électeurs inscrits sur les trois listes électorales des provinciales (Sud, Nord et îles, mais principalement celle du Sud). Ils y sont parvenus à quelques dizaines d’unités sur 6 000 demandes initiales.
Pour comprendre l’origine de ce formidable malentendu, il faut remonter au référendum du 9 novembre 1998 qui ratifie l’accord de Nouméa.
A l’époque, les documents de campagne édités par l’Etat expliquaient que, pour être inscrit sur les listes électorales des provinciales, il fallait justifier d’au moins dix ans de résidence. C’était le corps glissant.
Mais dès 1999, plusieurs responsables indépendantistes ont réclamé que ce corps soit gelé, et que les personnes arrivées après le 8 novembre 1988 ne puissent définitivement pas s’y inscrire.
En 2003, ils ont été entendus par le président Jacques Chirac à l’occasion d’un Comité des signataires houleux tenu à Koné. Et en 2007, juste avant la fin du mandat présidentiel, le Parlement réuni en Congrès à Versailles avait entériné le principe du gel.
Mais dans la foulée, la cour de cassation a fait une lecture littérale de l’ensemble des dispositions de l’article 188 de la loi organique, et en a déduit que si l’on n’était pas inscrit sur la liste générale de 1998, il fallait être arrivé avant 1988.
D’où les 6 000 demandes de radiation déposées en 2014, avec pratiquement autant de recours devant la justice, lesquels ont été en grande majorité rejetés en raison des règles de preuve.
Il y a quelques jours, Gilbert Tiuyénon, membre UC du gouvernement, déclarait sur RRB que la clôture politique du sujet ne signifiait pas que lui et ses alliés resteraient silencieux au moment de la tenue des commissions électorales.
1039 cas très litigieux. C’est
le nombre de personnes inscrites sur les listes électorales spéciales
dont on n’a pas la trace de leur présence avant 1998. Mais Roch Wamytan
estime à 4 000 le nombre de cas litigieux.
Repères
L’UC et ses satellites
Les
tentatives de radiations massives menées en 2014 puis 2015 de personnes
inscrites sur la liste électorale spéciale des provinciales ont été le
fait de l’Union calédonienne, de la Dynamique Unitaire Sud (DUS) et du
Parti travailliste, qui avaient constitué la commission politique et
citoyenneté.
En revanche, le Palika, l’UPM et le RDO se sont toujours tenus à l’écart de cette démarche.
« Pacte de confiance rompu »
Chez
les loyalistes, une partie du camp des Républicains ainsi que l’UCF
considèrent qu’en relançant les recours, l’UC a rompu le « pacte de
confiance » qui avait été conclu à Paris lors du dernier Comité des
signataires. À Calédonie ensemble et pour une autre partie des
Républicains, on considère qu’il s’agit là de gesticulation
politico-médiatique à ne pas prendre véritablement au sérieux.
Provinciales uniquement
Le contentieux en cours et les milliers de demandes de radiation ne
concernent que les listes électorales des provinciales, et non celle, en
préparation, du référendum. Cette autre liste sera constituée à partir
du mois d’avril, et fondée sur d’autres critères.